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La cellule, l'industrie et l'hôpital : le système de santé face à la promesse CAR-T

Soutenance de thèse de doctorat en sociologie de Théau Brigand

25 septembre 2024

EHESS, 54 boulevard Raspail, 75006 Paris

Jury

Maurice Cassier, directeur de recherche émérite au CNRS
Emmanuel Didier, directeur de recherche au CNRS - Centre Maurice-Halbwachs
Charlotte Brives, chargée de recherche au CNRS - Centre Emile Durkheim
Isabelle Moine-Dupuis, maître de conférences de droit privé et sciences criminelles à Dijon - Centre de Recherche sur le Droit des Marchés et des Investissements Internationaux
Jean-Paul Gaudillière, directeur de recherche Inserm/EHESS
Carine Vassy, maîtresse de conférences Université Sorbonne Paris Nord
Fabien Le-Bras, Hématologue, APHP
Jorge Alberto Bernstein Iriart, professeur, Universidade Federal da Bahia
Valérie Paris, Économiste, OCDE

Résumé

À l'été 2018, deux nouvelles thérapies anticancéreuses, le Kymriah® (Tisagenlecleucel - Tisacel) et le Yescarta® (Axicabtagene ciloleucel - Axicel), sont autorisées en Europe. Ces nouveaux traitements « CAR-T (Chimeric Antigen Receptor T-Cell) » modifient les gènes des lymphocytes T du système immunitaire des patients pour qu'ils ciblent des marqueurs exprimés par les cellules cancéreuses. Initialement destinées à des maladies hématologiques spécifiques après l'échec de plusieurs traitements, ces thérapies concernent d’abord quelques dizaines à centaines de patients par an. Cependant, il est anticipé que ces indications s'élargissent et que l'utilisation de ces thérapies se déploie, ouvrant un marché en pleine expansion où Tisacel et Axicel sont des pionniers.

Ces traitements se distinguent par plusieurs singularités lors de leurs premières autorisations. D'abord, bien que porteurs de promesses thérapeutiques significatives, celles-ci reposent sur des essais cliniques de phase précoce. Ils montrent des taux de rémission élevés pour des patients en situation critique, mais comportent également des incertitudes et des effets indésirables notables. De plus, l'intensité technologique élevée, le financement de la recherche et développement, et le protocole d'une injection unique se traduisent par un prix élevé, environ 300 000 euros par patient. Enfin, avec les cellules du patient comme matière première, de nouvelles interfaces et qualifications s’organisent entre l'industrie et les hôpitaux, touchant le travail clinique et la circulation des cellules et des patients.

En se concentrant sur Tisacel et Axicel dans leurs premières indications, cette thèse explore comment les promesses et les incertitudes liées aux thérapies CAR-T influencent et transforment la régulation du marché pharmaceutique, la clinique du cancer et les systèmes de santé, notamment en France.

La recherche s’appuie sur divers matériaux et terrains : un large corpus de sources écrites (articles scientifiques, rapports financiers, rapports institutionnels et transcriptions de débats sur la règlementation), une enquête sur la propriété intellectuelle, 55 entretiens avec les principaux acteurs du domaine (chercheurs, professionnels de santé, responsables administratifs, industriels, représentants d'associations de patients) et deux ethnographies hospitalières de huit semaines chacune réalisées en 2021 et 2022.

La première partie de la thèse se concentre sur l'émergence des promesses liées aux CAR-T, elle retrace leur développement depuis les recherches fondamentales jusqu'à l’autorisation de mise sur le marché, en mettant en lumière les collaborations entre chercheurs académiques et entreprises privées. En suivant l'histoire de ces thérapies à travers les publications, accords de collaboration et brevets, la thèse montre la transition des financements académiques vers des financements privés motivée par les promesses scientifiques et médicales des CAR-T. La deuxième partie analyse l'intégration des CAR-T dans les systèmes de santé, examinant leur évaluation règlementaire, la négociation des prix et leur accès au marché. En explorant le rôle des agences de régulation et des institutions de santé, l'étude décrit un modèle d’accueil de la promesse CAR-T et de consentements aux incertitudes, cherchant un équilibre entre enjeux économiques, financiers et industriels, considérations cliniques et organisation de l’accès. Enfin, la troisième partie explore le déploiement des thérapies CAR-T dans les hôpitaux, leur intégration dans les pratiques cliniques et les dynamiques professionnelles. Elle documente le travail des CAR-T et les nouvelles interactions avec l'industrie pharmaceutique. Cette partie décrit la transformation des hôpitaux en espaces de production industrielle et des professionnels de santé en travailleurs du médicament, tout en identifiant des formes de résistance et de contestation de ces derniers face à l'influence accrue de l'industrie.


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